Sous vos longues chevelures
Sous vos longues chevelures, petites fées,
Vous chantâtes sur mon sommeil bien doucement,
Sous vos longues chevelures, petites fées,
Dans la forêt du charme et de l'enchantement.
Dans la forêt du charme et des merveilleux rites,
Gnomes compatissants, pendant que je dormais,
De votre main, honnêtes gnomes, vous m'offrîtes
Un sceptre d'or, hélas ! pendant que je dormais.
J'ai su depuis ce temps que c'est mirage et leurre
Les sceptres d'or et les chansons dans la forêt;
Pourtant, comme un enfant crédule, je les pleure,
Et je voudrais dormir encor dans la forêt.
Qu'importe si je sais que c'est mirage et leurre !
(Jean Moréas)
La licorne
Quand Dieu fit l'univers il y eut sur la terre
Des milliers d'animaux inconnus aujourd'hui
Mais la plus jolie dans ce vert paradis
La plus drôle, la plus mignonne
C'était la licorne.
Y’avait des gros crocodiles, des orangs-outangs,
Des affreux reptiles et des beaux moutons blancs,
Des chats, des rats, des éléphants,
Mais la plus mignonne de toutes les bêtes à cornes
C’était la licorne.
Quand il vit des pécheurs faire leurs premiers péchés,
Dieu se mit en colère et appela Noé,
Mon bon vieux Noé, je vais noyer la terre,
Construis-moi un grand bateau pour flotter sur l'eau.
Mets-y des gros crocodiles, des orangs-outangs,
Des affreux reptiles et des beaux moutons blancs,
Des chats, des rats, des éléphants
Et n’oublie personne
N’oublie pas ma mignonne, ma jolie licorne.
Quand son bateau fut prêt à surmonter les flots
Noé y fit monter les animaux deux par deux
Et déjà la pluie commençait à tomber,
Quand il cria « Seigneur, j'ai fait pour le mieux.
J'ai mis deux gros crocodiles, deux orangs-outangs,
Deux affreux reptiles et deux beaux moutons blancs,
Deux chats, deux rats, deux éléphants,
Il n’y manque personne
A part les deux mignonnes, les jolies licornes. »
Elles riaient les mignonnes et pataugeaient dans l'eau
S'amusant comme des folles sans voir que le bateau
Emmené par Noé les avait oubliées
Et depuis jamais personne
N’a vu de licornes.
On voit des gros crocodiles, des orangs-outangs,
Des affreux reptiles et des beaux moutons blancs,
Des chats, des rats, des éléphants,
Mais jamais personne
Ne verra la mignonne, la jolie licorne.
(Paroles : Jean Broussolle)
Les elfes
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Du sentier des bois aux daims familier,
Sur un noir cheval, sort un chevalier.
Son éperon d'or brille en la nuit brune;
Et, quand il traverse un rayon de lune,
On voit resplendir, d'un reflet changeant,
Sur sa chevelure un casque d'argent.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ils l'entourent tous d'un essaim léger
Qui dans l'air muet semble voltiger.
- Hardi chevalier, par la nuit sereine,
Où vas-tu si tard ? dit la jeune Reine.
De mauvais esprits hantent les forêts
Viens danser plutôt sur les gazons frais.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Non ! ma fiancée aux yeux clairs et doux
M'attend, et demain nous serons époux.
Laissez-moi passer, Elfes des prairies,
Qui foulez en rond les mousses fleuries;
Ne m'attardez pas loin de mon amour,
Car voici déjà les lueurs du jour.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Reste, chevalier. Je te donnerai
L'opale magique et l'anneau doré,
Et, ce qui vaut mieux que gloire et fortune,
Ma robe filée au clair de la lune.
- Non ! dit-il. - Va donc ! - Et de son doigt blanc
Elle touche au cœur le guerrier tremblant.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Et sous l'éperon le noir cheval part.
Il court, il bondit et va sans retard;
Mais le chevalier frissonne et se penche;
Il voit sur la route une forme blanche
Qui marche sans bruit et lui tend les bras :
- Elfe, esprit, démon, ne m'arrête pas !
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ne m'arrête pas, fantôme odieux !
Je vais épouser ma belle aux doux yeux.
- Ô mon cher époux, la tombe éternelle
Sera notre lit de noce, dit-elle.
Je suis morte ! - Et lui, la voyant ainsi,
D'angoisse et d'amour tombe mort aussi.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
(Charles-Marie Leconte De Lisle)
La fée
Viens, bel enfant ! Je suis la Fée.
Je règne aux bords où le soleil
Au sein de l'onde réchauffée
Se plonge, éclatant et vermeil.
Les peuples d'Occident m'adorent
Les vapeurs de leur ciel se dorent,
Lorsque je passe en les touchant;
Reine des ombres léthargiques,
Je bâtis mes palais magiques
Dans les nuages du couchant.
Mon aile bleue est diaphane;
L'essaim des Sylphes enchantés
Croit voir sur mon dos, quand je plane,
Frémir deux rayons argentés.
Ma main luit, rose et transparente;
Mon souffle est la brise odorante
Qui, le soir, erre dans les champs;
Ma chevelure est radieuse,
Et ma bouche mélodieuse
Mêle un sourire à tous ses chants.
J'ai des grottes de coquillages;
J'ai des tentes de rameaux verts;
C'est moi que bercent les feuillages,
Moi que berce le flot des mers.
Si tu me suis, ombre ingénue,
Je puis t'apprendre où va la nue,
Te montrer d'où viennent les eaux;
Viens, sois ma compagne nouvelle,
Si tu veux que je te révèle
Ce que dit la voix des oiseaux.
(Victor Hugo)
Si tu veux, faisons un rêve
Si tu veux, faisons un rêve :
Montons sur deux palefrois;
Tu m'emmènes, je t'enlève.
L'oiseau chante dans les bois.
Je suis ton maître et ta proie;
Partons ! c'est la fin du jour;
Mon cheval sera la joie,
Ton cheval sera l'amour.
Viens ! nos doux chevaux mensonges
Frappent du pied tous les deux,
Le mien au fond de mes songes,
Et le tien au fond des cieux.
Un bagage est nécessaire;
Nous emporterons nos vœux,
Nos bonheurs, notre misère,
Et la fleur de tes cheveux.
Viens, le soir brunit les chênes;
Le moineau rit; ce moqueur
Entend le doux bruit des chaînes
Que tu m'as mises au cœur.
Ce ne sera point ma faute
Si les forêts et les monts,
En nous voyant côte à côte,
Ne murmurent pas : aimons !
Allons-nous en par l'Autriche !
Nous aurons l'aube à nos fronts;
Je serai grand, et toi riche,
Puisque nous nous aimerons !
Allons-nous en par la terre,
Sur nos deux chevaux charmants,
Dans l'azur, dans le mystère,
Dans les éblouissements !
Tu seras Dame, et moi Comte;
Viens, mon cœur s'épanouit;
Viens, nous conterons ce conte
Aux étoiles de la nuit.
Les elfes
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Du sentier des bois aux daims familier,
Sur un noir cheval, sort un chevalier.
Son éperon d'or brille en la nuit brune;
Et, quand il traverse un rayon de lune,
On voit resplendir, d'un reflet changeant,
Sur sa chevelure un casque d'argent.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ils l'entourent tous d'un essaim léger
Qui dans l'air muet semble voltiger.
- Hardi chevalier, par la nuit sereine,
Où vas-tu si tard ? dit la jeune Reine.
De mauvais esprits hantent les forêts
Viens danser plutôt sur les gazons frais.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Non ! ma fiancée aux yeux clairs et doux
M'attend, et demain nous serons époux.
Laissez-moi passer, Elfes des prairies,
Qui foulez en rond les mousses fleuries;
Ne m'attardez pas loin de mon amour,
Car voici déjà les lueurs du jour.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
- Reste, chevalier. Je te donnerai
L'opale magique et l'anneau doré,
Et, ce qui vaut mieux que gloire et fortune,
Ma robe filée au clair de la lune.
- Non ! dit-il. - Va donc ! - Et de son doigt blanc
Elle touche au cœur le guerrier tremblant.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Et sous l'éperon le noir cheval part.
Il court, il bondit et va sans retard;
Mais le chevalier frissonne et se penche;
Il voit sur la route une forme blanche
Qui marche sans bruit et lui tend les bras :
- Elfe, esprit, démon, ne m'arrête pas !
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
Ne m'arrête pas, fantôme odieux !
Je vais épouser ma belle aux doux yeux.
- Ô mon cher époux, la tombe éternelle
Sera notre lit de noce, dit-elle.
Je suis morte ! - Et lui, la voyant ainsi,
D'angoisse et d'amour tombe mort aussi.
Couronnés de thym et de marjolaine,
Les Elfes joyeux dansent sur la plaine.
(Charles-Marie Leconte De Lisle)