Mise en place en 2007, la libéralisation du marché de l’électricité n’a pas vraiment profité aux particuliers, déplore l’association de consommateurs CLCV. Tant sur le prix que sur les innovations, les fournisseurs alternatifs se sont davantage fait remarquer par les démarchages abusifs et les “offres trompeuses”
Près de 15 ans après l’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence, les opérateurs alternatifs à EDF n’ont pas su en faire réellement profiter les ménages, dénonce la CLCV dans une étude publiée ce mercredi 10 mars. Si bien que l’association de consommateurs estime que ce tournant est un “échec” et milite pour “un retour au monopole d'EDF” à partir de 2025, date à laquelle les fournisseurs alternatifs ne pourront plus bénéficier du dispositif de l’Arenh. L’accès régulé à l'électricité nucléaire historique permet aux concurrents du marché de bénéficier d’une partie de l’énergie nucléaire bon marché produite par EDF.
Au travers de cette enquête fouillée, l’association liste les trois principales lacunes qui freinent considérablement l’essor de ces offres alternatives : la dépendance excessive à EDF, le manque d’innovation, mais aussi le démarchage abusif et les offres trompeuses, source de perte de méfiance du grand public.
Des concurrents trop dépendants d’EDF
Contrairement à la concurrence instaurée chez les opérateurs télécoms, les compagnies aériennes ou les assureurs (notamment l’assurance emprunteur), le marché de l’électricité n’a pas vu le montant de ses factures s’abaisser. Au contraire, les tarifs ont augmenté continuellement sur propositions successives de la commission de régulation de l’énergie.
Si les nouveaux acteurs ne parviennent pas à se démarquer et à casser les prix, c'est qu’ils sont pieds et poings liés à EDF. Il faut dire que leur approvisionnement dépend aux trois quarts du système de l’Arenh, leur permettant d’obtenir une électricité nucléaire bon marché… auprès du fournisseur historique. Sans parler du réseau de transport et de distribution, qui représentent les mêmes coûts pour tous les concurrents d’EDF. Difficile donc de se démarquer avec autant de points communs, surtout en matière tarifaire. “Cette situation perdurera fort longtemps. Pour qu’un changement structurel survienne, il faudrait que les opérateurs alternatifs développent un système de production qui soit très différent et substantiellement plus compétitif que le nucléaire. Cette perspective semble fort hypothétique”, conclut l’association de consommateurs.
Résultats des courses : Total Direct Energie ou encore Eni ont tous opté pour la mise en place de tarifications proportionnelles aux tarifs bleus d’EDF. Avec la promesse de bénéficier d’une électricité 10 à 15% moins chère. Et encore une fois les taxes intégrées, la ristourne finale sur la facture ne dépasse guère 6 à 7%.
Un manque d’innovation
Aucune nouveauté fondamentale en 20 ans. Voilà l’un des messages principaux de l’association, qui note des diversifications secondaires, mais insuffisantes pour opérer une rupture. A la manière d’une banque proposant, en parallèle de son crédit immobilier, une assurance habitation, les concurrents d’EDF proposent en plus de de leurs contrats des travaux d’isolation. Ces offres sont surtout un corollaire de l’action publique, obligeant les fournisseurs à financer la transition écologique du bâtiment par des certificats d’économies d’énergie (CEE).
A priori innovantes, les offres d’électricité “vertes” n’ont pas changé la donne. S’il est possible de soutenir financièrement un fournisseur vertueux – Enercoop et Planète Oui ont investi dans le développement d’une capacité de production d’énergies renouvelables par exemple -, il convient de rappeler que l’électricité est distribuée par un réseau centralisé. Impossible donc pour le fournisseur de dire que l'électricité consommée par le ménage provient d’une source écologique, tous les électrons circulant sans distinction d’origine. L’ensemble des énergies produites - par le nucléaire ou les énergies renouvelables - s’amalgament et se déversent in fine dans un même tuyaux central. La CLCV estime que la solution la plus simple serait donc que chaque fournisseur dispose d’une capacité de stockage permettant de décentraliser le réseau et ainsi fournir aux ménages des offres vertes “sur mesures” et “
Bien que le système soit complexe et les gains générés trop faibles, la CLCV reconnaît néanmoins l’innovation que représente les nouveaux contrats à tarification “dynamique”. Ces offres nouvelle génération sont issues d’une réglementation européenne obligeant les gros fournisseurs d’électricité à proposer des contrats dits à tarification variable. Autrement dit, la facture d’électricité ne serait plus fonction des tarifs bleus d’EDF (les fameux tarifs réglementés de vente) mais entre autres des prix de la Bourse européenne de l'énergie, Epex Spot. Chaque jour, le consommateur reçoit les tarifs en vigueur pour le lendemain, et doit ainsi adapter sa consommation s’il souhaite effectuer des économies. Il faudra pour cela décaler ses gros postes de dépenses d’énergie aux heures creuses les moins chères, et éviter les heures de pointes : à savoir 8h et 19h. Mais ce type de contrat ne sera pas obligatoire avant 2022 chez les fournisseurs.
Des démarchages abusifs et des “offres trompeuses”
La concurrence n’a donc pas amené de révolution tarifaire, ni de révolution technologique, et a même conduit à des pratiques dont s’alarment le médiateur de l’énergie. Ce dernier, à l’occasion de la publication de son rapport d’activité en 2019, alertait sur l’augmentation de 65% des “pratiques commerciales abusives ou agressives” en 3 ans. Avec l’objectif pour les entreprises incriminées de faire grossir au maximum leur portefeuille, et au passage abaisser la part de marché d’EDF. “Dans la mesure où les consommateurs peuvent revenir à leur opérateur d’origine sans frais, l’enjeu est moins financier que lié, nous pesons nos mots, au traumatisme que provoque ce type de démarchage”, analyse la CLCV, qui a engagé 8 actions en justice à l’encontre de fournisseurs depuis 2018. Pour ces victimes, l’image même de ces entreprises est si dégradée qu’EDF prend l’allure d’une valeur refuge. Et l’opération aboutit à l’inverse du résultat souhaité.
En février 2020, la la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) a ainsi infligé une amende de 315.000 euros à Eni. La raison : le fournisseur italien n’a pas respecté le droit de rétractation des clients, ces derniers ayant conclu dans la précipitation et sous la pression des contrats. Ce même mois, Engie avait aussi reçu une amende de la DGCCRF (900.000 euros), dans le cadre du démarchage téléphonique cette fois. Les clients n’avaient même pas confirmé leur volonté à l’écrit, par le biais d’un courrier ou courriel.
Enfin, les qualifications parfois alambiquées des offres viennent renforcer la méfiance de la clientèle. Une offre 100% internet n'est qu’un synonyme d’une offre sans service client téléphonique. Les “offres neutres en carbone" ne veulent pas dire que l’électricité est issue d’énergie renouvelable. Les fournisseurs compensent la plupart du temps l’électricité produite à partir de ressources fossiles (pétrole, charbon, nucléaire) par l’achat de garantie d’origine, octroyé notamment par des fournisseurs norvégiens. La neutralité est ainsi atteinte en achetant autant un nombre de garanties d’origine couvrant la consommation annuelle des clients en offres “neutres” ou “vertes”.
capital.fr
Ça pour démarcher, ils ont démarché, mais si on regarde leurs propositions d'un peu près, ils n'étaient pas compétitifs et ça ne valait pas le coup de changer de fournisseur.
Pourtant en téléphonie mobile, l'ouverture à la concurrence permis de faire baisser les prix et d'avoir une meilleure qualité, mais visiblement, il y a des secteurs où ça ne fonctionne pas.
Il y en a parmi vous qui ont changé de fournisseur en électricité ?