Reportage à bord d'un 39 tonnes. Pour voir comment c'est du côté des « méchants » routiers.
GAËLLE CARON > gaelle.caron@nordeclair.fr
Entrepôt du transporteur Depaeuw, Pérenchies, mardi matin, 9 h 15. Gérard, le conducteur, et Patrick, le chef de quai, ont fini de charger les 32 palettes de marchandise. La bête est prête, repue. Dans son gros ventre de 39 tonnes, des confiseries Verquin, fabriquées à Tourcoing, du café Méo, torréfié à Lille, de la vinaigrette Lesieur, en provenance de Dunkerque, ou encore des légumes secs de Valenciennes. Bref, un condensé du savoir-faire régional en partance pour la centrale d'achat Leclerc de Mont-de-Marsan, dans les Landes. « Ces produits vont approvisionner les supermarchés du sud-ouest. Grâce aux camions, c'est le Nord qui s'exporte », souligne Julien Depaeuw, le directeur de la société du même nom.
« Camion de ducasse... » Contact. C'est parti pour 24 heures de « co-camionnage », pauses et coupure inclus. Le temps de savoir si les routiers, ces menaçants gros bras en « marcel », font vraiment exprès de toujours déboiter pour doubler quand on est juste derrière... Gérard, 39 ans, sourit. Les caricatures sur son métier, il les connaît par coeur. Et s'il a accepté d'embarquer une journaliste avec lui sur une longue distance, c'est justement dans l'espoir de tordre le cou aux clichés. « Les gens ont toujours l'image de gros tatoués désagréables en camion de ducasse avec des guirlandes sur le pare-brise et qui s'arrêtent sur le bord des routes pour faire monter une fille... Il y en a des comme ça, je suis d'accord, mais ce n'est pas une généralité. En tout cas, je ne me retrouve pas dans cette description », souligne Gérard, l'opposé du « costaud avec un pois chiche à la place du cerveau », selon l'expression qu'il prend un malin plaisir à mimer.
S'il s'amuse des préjugés physiques sur les routiers, de leur soi-disant addiction à la « cibi », le « chauffeur » expérimenté s'agace en revanche des idées toutes faites sur leur comportement au volant. « Y'a pas longtemps, j'étais invité avec ma femme à un repas. À table, une personne a comparé les routiers à des assassins sans savoir ce que je faisais. J'ai laissé dire et quand elle m'a demandé qu'elle était ma profession, je lui ai répondu assassin » , raconte Gérard, qui refuse de laisser passer ce genre de « connerie ». Même si on a parfois l'impression qu'ils roulent vite, les semi-remorques sont bridés à 90 km/h. Et quand l'un d'eux s'autorise un dépassement, c'est qu'il est à 92-93 km/h maxi. « Un camion n'est pas un jouet. Moi aussi j'ai des enfants et puis je m'aime bien. J'ai pas envie de mourir ni d'avoir un mort sur la conscience toute ma vie ».
Enfin, il faut savoir que les routiers sont tenus à des temps de pause obligatoires : 45 minutes toutes les 4 h 30 et pas plus de 10 h de volant par jour, explique Gérard. Impossible de déroger à la règle. Avec le temps, le disque en papier du chronotachygraphe a été remplacé par une carte numérique, qui enregistre l'activité des camions dans les moindres détails. Et puis Eliot, l'ordinateur de bord, permet aux entreprises de transport de géolocaliser leurs véhicules « à n'importe quel moment et à dix mètres près ».
Le bitume de l'A1 défile. À peine midi, le beau camion bleu Depaeuw passe sous les pistes de l'aéroport de Roissy. Périph' ou Francilienne ? C'est toujours le même dilemme pour Gérard, branché sur Autoroute FM. Cette fois ce sera périph'. On croise les doigts. 900 bornes à 90 km/h, c'est déjà bien assez long comme ça... Porte de Bercy, ça bouchonne un peu, mais le conducteur est optimiste. « C'est normal, c'est la sortie Paris centre et Paris plage...
Ça va pas durer ». Bien senti.
À 13 h 25, l'équipage a atteint sans suer le centre routier près d'Orléans. Pause sandwich-café-clope, et c'est reparti via l'A10, puis la Nationale 10, jusqu'à Anais, près d'Angoulême, où Gérard a dégoté un relais routier pour dîner et passer la nuit. Mais avant cela, il doit encore aller se doucher, dans les sanitaires communs, et préparer sa couchette. Maniaque, il met un point d'honneur à épousseter la cabine et à transformer la banquette, derrière les deux fauteuils, en un petit lit douillet avec drap housse et couette lessivés. « C'est un peu ma deuxième maison. Donc j'ai envie de me sentir bien ». 23 h 30. Extinction des feux. Ce soir, pas de DVD sur le lecteur portable, car la nuit sera courte.
Après l'alimentaire, le bois Mercredi matin, 5 h. Le poids lourd Depaeuw démarre. N10 jusqu'à Bordeaux. A62, sortie 3. N524. Dernière ligne droite. Après un périple de 24 h, dont la moitié passée sur l'asphalte, la ligne d'arrivée est enfin franchie. La centrale d'achats Leclerc de Mont-de-Marsan attend sa marchandise du Nord. Gérard se met à quai. Déchargement, paperasse, la mission s'achève. Mais une autre commence. Pas question de rentrer à vide. Direction Morcenx, à 42 km, où une cargaison de bois doit être livrée à Marcq-en-Baroeul jeudi après-midi. À ce moment-là seulement, Gérard pourra rentrer chez lui, à Lambersart, et retrouver sa femme, Murielle, et ses enfants, Jean et Noémie. Noémie qui ne s'est vraiment pas trompée en offrant à son papa un porte-clé « routier sympa »...
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Coup de pub pour la société de transport bien encensé dans le reportage ou les médias auraient reçu instruction de ne plus dévaloriser la profession
D'autres articles nous le diront mais encore une fois le journaliste n'a pas potasser convenablement son dossier un 39 t je ne connais pas et je doute que ça existe on est passé au 40t depuis fort longtemps et 900 Km à 90 Km/h ça fait un dépassement de conduite de pas loin d'une heure voir plus celons la circulation.
J'aime rouler, être tranquille, n'avoir personne sur le dos à longueur de journée. C'est mon petit luxe.
Ça j'adore, il n'a pas de téléphone dans le camion avec des exploitants qui lui sonne sans arrêt et ces journée sont toutes tranquille.
On ne doit pas faire le même métier alors ou sinon il travaille dans une boite exceptionnelle et il faut qu'il envisage de rester chez eux jusqu'à la retraite.
Le métier et tout ce qu'on veut mais certainement pas tranquille, il est fait de contrainte et de stresse permanent c'est d'ailleurs pour ça qu'il manque des chauffeurs dans tous les pays d'Europe et que les jeunes s'enfuient en courant au bout de quelques années;