La commémoration de la victoire alliée en France
depuis 1945
Depuis 1945, la commémoration de la victoire alliée sur l'Allemagne nazie a connu bien des vicissitudes ( 1 ).
En 1946, pour ne pas retarder l'effort de production qui conditionnait la réussite de la reonstruction économique de la France, il a été décidé de reporter la célébration de la victoire de 1945, le dimanche 12 mai.
Le général de GAULLE invité par le président Félix GOUIN, à participer à cette commémoration, déclina cette invitation et annonça que le dimanche 12 mai il se rendrait sur la tombe de Georges CLEMENCEAU.
Le 7 mai 1946, l'Assemblée Constituante a voté une loi ( 2 ) qui fixait pour les années à venir cette commémoration au 8 mai si ce jour était un dimanche, ou au premier dimanche suivant le 8 mai, le même jour que la fête traditionnelle de Jeanne d'Arc, qui avait délivrée Orléans le 8 mai 1429.
Cet amalgame permettait de rassembler les combattants des deux guerres mondiales et d'exalter la Résistance, tout en prônant la réconciliation nationale.
Ainsi, le culte de la « bonne Lorraine » a fait l'objet d'une remarquable continuité : arme de combat de la droite nationaliste et cléricale avant-guerre, utilisée par le régime de Vichy sous l'Occupation pour dénoncer à la fois l' « esprit de jouissance » et la gauche anticléricale du Front populaire, accusée d'être responsable de la défaite de 1940, le culte de Jeanne d'Arc a été repris à son compte par la gauche laïque et anticléricale, majoritaire à l'issue des élections d'après-guerre.
En 1948, François MITTERRAND, alors ministre des anciens combattants, a confirmé le caractère non férié de la célébration du 8 mai 1945.
En 1951, le gouvernement a décidé de commémorer la victoire alliée de 1945 le 8 mai, sans attendre le dimanche.
À la demande des associations d'anciens combattants, résistants et déportés, la loi du 20 mars 1953 a déclaré le 8 mai jour férié, mais non chômé.
Après le retour au pouvoir du général de GAULLE, le décret du 11 avril 1959 a décidé que le 8 mai ne serait plus férié et qu'il serait célébré le deuxième dimanche du mois. Cette décision, qui faisait suite à la suppression de la retraite du combattant, entraîna la protestation des associations d'anciens combattants.
En 1965, le 8 mai a été exceptionnellement et ponctuellement rétabli jour férié à l'occasion du 20ème anniversaire de la victoire alliée.
Le décret du 17 janvier 1968 a rétabli la célébration du 8 mai, mais en fin de journée.
En 1975, le président de la République, Valéry GISCARD D'ESTAING, déclarant qu'il était « temps d'ouvrir la voie de l'avenir », a décidé de mettre fin à la célébration de la victoire alliée de 1945, au nom de la réconciliation franco-allemande. Il a annoncé sa décision aux membres du Conseil européen en ces termes :
« J'ai décidé avec le gouvernement français [ présidé alors par Jacques CHIRAC ], de ne plus commémorer désormais cet anniversaire, qui sera ainsi le 30ème et le dernier ».
Cette annonce a provoqué une vive émotion dans le milieu des anciens combattants, résistants, déportés.
Le 1er juin 1981, au lendemain de l'élection de François MITTERRAND à la présidence de la République, le nouveau secrétaire d'État aux anciens combattants a annoncé qu'une loi allait rétablir le 8 mai comme commémoration nationale.
La loi du 23 septembre 1981 a redonné au 8 mai son caractère férié, qu'il a conservé depuis.
La commémoration de la victoire alliée
à Reims depuis 1945
Le premier anniversaire en 1946
À Reims, le 7 mai 1946, le premier anniversaire de la capitulation de l'Allemagne nazie a fait l'objet d'une cérémonie courte et discrète sur les lieux devenus historiques de la Salle de guerre conservée dans les bâtiments du collège moderne et technique de la ville.
En présence du capitaine RINGWOOD, officier américain attaché à la radiodiffusion française qui, à cette occasion, établit une liaison radio avec les États-Unis, le sous-préfet, Maurice PICARD, ancien déporté de Dachau, puis le maire de Reims, Michel SICRE, ancien président du Comité départemental de Libération, ont dégagé la signification pour les Rémois et les Français, de l'« armistice ( sic ) du 7 mai 1945 », et remercié les Alliés, en particulier les Américains, pour « l'aide immense » qu'ils leur ont apportée. La chorale du collège a chanté La Marseillaise, Le Chant du départ, puis l'hymne national américain, The Star Spangle Banner.
L'Union, 8 mai 1946
Cette cérémonie a été relatée en quelques lignes à la Une de L'Union daté du 8 mai 1946, journal issu de la Résistance, qui, dans son édition du 9 mai 1946, rappelait que « c'était le 8 mai, à 19 heures 45 ( sic ), que l'acte de reddition marquant l'écrasement total des armées allemandes fut signé à Berlin », et que la commémoration nationale aurait lieu le dimanche 12 mai, ce qui contribuait déjà à effacer Reims et le 7 mai.
L'Union, 9 mai 1946
La commémoration de 1955
À partir de 1955, à Reims, les commémorations décennales de la victoire de 1945, ont revêtu un éclat particulier, que l'on retrouve à la Une du journal L'Union.
L'Union, 7 et 8 mai 1955
Le 8 mai 1955, à l'occasion de la fête de Jeanne d'Arc et du 10ème anniversaire de la victoire de 1945, a été inauguré le Monument aux martyrs de la Résistance érigé dans les Promenades à proximité du monument aux morts de la ville de Reims, en présence de Monseigneur MARMOTTIN, et du maire de Reims, René BRIDE.
La veille, une délégation d'anciens déportés rémois s'était rendue à l'Hôtel de Ville de Saint-Mandé où une urne, contenant les cendres de déportés recueillies dans les camps de concentration, leur a été remise solennellement par Madame JARDELLE, vice-présidente de l'Associations des familles de résistants et otages, en présence du général ZELLER, gouverneur militaire de Paris et du sénateur-maire de Saint-Mandé, Jean BERTAUD. Cette urne, ramenée à Reims, a été déposée au pied du monument des martyrs de la Résistance inauguré le 8 mai 1955.
L'Union, 9 mai 1955
René JARDELLE, ancien maire de Reims et président du Comité d'érection de ce monument prononça une allocution :
« Nous devons avoir une seule pensée, tendue entièrement vers ceux dont les noms sont gravés sur ces pierres et vers tous ceux, connus ou inconnus, qui, de leur vie, nous ont donné l'indépendance.
C'est au culte de nos morts que cette cérémonie est vouée et particulièrement à tous ceux qui, sous le signe de la résistance, ont donné leur vie pour que la France soit sauvée du déshonneur et de la défaite.
Il convient de souligner l'héroïsme de ceux qui ne sont présents ici que parce que nous restons fidèles à leur mémoire.
Ils ont donné le meilleur d'eux-mêmes et en élevant ce monument à leur gloire, nous avons voulu grouper en un seul faisceau de reconnaissance tout ce qui vibre en nos cœurs, tout ce que chacun ressent avec ferveur »
Le journal L'Union daté du 9 mai 1955, a rendu compte de cette inauguration « dans Reims, la cité martyre et sans cesse renaissante » en ces termes :
« L'étendard de la liberté est le même depuis des siècles.
C'est celui fièrement brandi le jour du sacre, par Jeanne la Lorraine.
C'est celui qui rallia après le drame de 1870 les glorieux combattants de la clandestinité, fils courageux et magnifiques de ceux de 14-18 ... ».
Le même jour a été inaugurée, en présence d'un représentant de l'ambassade des États-Unis, la plaque commémorative érigée sur la façade de l'immeuble dont le général EISENHOWER avait fait sa résidence, boulevard Lundy.
17, boulevard Lundy
Le général EISENHOWER, devenu président des États-Unis, invité par la Ville de Reims, avait fait parvenir un télégramme au maire, René BRIDE, dans lequel il regrettait de ne pouvoir être présent.
« Je suis très honoré de votre aimable invitation à assister aux cérémonies du 8 mai. Je regrette beaucoup de ne pouvoir être présent , mais je vous adresse mes plus chaleureux sentiments et mes meilleurs voeux pour vous et les citoyens de Reims qui ont une place toute particulière dans ma mémoire.
Dwigh D. Eisenhower »
La commémoration de 1965
La commémoration du 20ème anniversaire de la Victoire a eté marquée par la participation de Gilbert GRANDVAL, ministre du Travail, aux cérémonies commémoratives organisées par la Ville de Reims.
Compagnon de la Libération, le colonel GRANDVAL avait commandé, en 1943-1944, la Région C dont faisait partie Reims et le département de la Marne dans la Résistance. À cette occasion, il a été reçu dans les locaux de L'Union, journal régional issu de la Résistance, qui inaugurait ses nouvelles installations modernisées
L'Union, 8-9 mai 1965
Gilbert GRANDVAL ( à gauche ) serre la main d'André VANDRENA ( à droite ), chef photographe du journal, en présence de Pierre BOUCHEZ ( au centre ), ancien chef départemental des FFI de la Marne, devenu directeur de L'Union.
Les cérémonies commémoratives du 20ème anniversaire se sont déroulées le dimanche 9 mai, toujours associées à la fête de Jeanne d'Arc.
tient une ptite parti !!