Les millionnaires de Moscou jouent les pauvres à Genève
Lassés des fastes de leur vie quotidienne, de riches Moscovites payent pour se placer dans la peau d'un chauffeur de taxi ou d'un musicien de rue.
Musicien de rue
Musicien de rue
Vu sur laSophie Gaitzsch a écrit:
Y'en a marre du luxe! Les millionnaires russes sont las de se rendre à de somptueuses soirées, de monter dans leur avion privé pour aller assister à la finale de la Coupe du monde de football ou encore de faire de l'Helsinki sur les plus beaux sommets.
Ce qu'ils veulent vraiment, c'est jouer les contrôleurs dans les bus genevois. Ou alors jouer le mendiant à Milan, la prostituée à Paris...
«Chauffeur de taxi, strip-teaseur, auto-stoppeur, clochard», ils ont l'embarras du choix, nous explique à Genève Sergei Kniazev, dynamique quinquagénaire à la tête du Club ludique qui depuis quelques années offre une métamorphose temporaire à ses clients.
Les membres de ce club très select, réunissant la crème des businessmen et des politiciens moscovites, sont tous à la recherche de nouvelles sensations fortes. Et disposés à payer entre 5000 et 20 000 dollars par personne pour jouer les pauvres.
«Ils possèdent de superbes maisons, des voitures de luxe, sont entourés de gens qui leur obéissent au doigt et à l'œil, évoluent dans le cercle très restreint de leurs semblables et voient le monde réel à travers une vitre.
Leur vie est beaucoup trop prévisible. Les propulser dans un environnement déstabilisant, voilà ce que je leur offre!»
Et le filon est bon. Nouvelle capitale du luxe, Moscou est devenue la vitrine de toutes les extravagances. Grâce au boom des revenus pétroliers, au commerce du gaz ou de l'acier, une petite partie de la population ne cesse de s'enrichir.
Le nombre de millionnaires augmente à un rythme d'environ 15% par an et ces nouveaux fortunés ne se refusent aucun caprice coûteux.
Depuis le jour où Sergei Kniazev a eu l'idée de proposer à un groupe d'amis blasés des restaurants chics de faire le service dans une gargote malfamée de la gare de Moscou pour fêter un anniversaire, les demandes n'ont cessé d'affluer.
Afin que le concept ne s'essouffle pas, le club organise depuis quelque temps des «jeux» dans les villes d'Europe occidentale.
Il y a un an et demi, neuf de ses clients ont endossé l'uniforme des employés des Transports Publics Genevois. «Sans autorisation, bien évidemment. « Mais nous n'avons pas perçu d'amende et nous nous sommes limités à faire des remontrances aux passagers voyageant sans billet.»
«Inacceptable!», réagit Catherine Legendre, du service de presse des TPG. «Etre contrôleur est un métier, et pas une rigolade pour laquelle on paie. Ces gens se moquent vraiment de professionnels qui exercent une activité difficile. C'est aussi un manque total de respect pour nos usagers.»
La première et dernière fois, promet Sergei Kniazev. «La « manœuvre » a failli mal se terminer quand la supercherie a été remarquée.» Nos visiteurs russes se sont rattrapés le lendemain en se déguisant en musiciens de rue au bord du lac.
Somme tous assez inoffensifs, les amusements proposés par le Club ludique n'en demeurent pas moins ridicules, voire indécents, aux yeux d'une majorité de gens. «Mais non, assure Sergei Kniazev, c'est un divertissement comme un autre.»
Si les "Apôtres" du régime passé revenaient, les goulags ne menqueraient pas de se remplir a nouveau !