"L'absence" Marceline Desbordes-Valmore
L'absence.
Quand je me sens mourir du poids de ma pensée,
Quand sur moi tout mon sort assemble sa rigueur,
D'un courage inutile affranchie et lassée,
Je me sauve avec toi dans le fond de mon cœur !
Tu grondes ma tristesse, et, triste de mes larmes,
De tes plus doux accents tu me redis les charmes :
J'espère ! ... car ta voix, plus forte que mon sort,
De mes chagrins profonds triomphe sans effort.
Je ne sais ; mais je crois qu'à tes regrets rendue,
Dans ces seuls entretiens tu m'as tout entendue.
Tu ne dis pas : « Ce soir ! » Tu ne dis pas : « Demain ! »
Non, mais tu dis : « Toujours ! » en pleurant sur ma main.
Marceline Desbordes-Valmore.
« La vie est l'école de l'absence. On apprend à vivre sans les autres, sans ceux qui nous ont aimés et que nous avons aimés. »
Christian Authier
Dors !
L'orage de tes jours a passé sur ma vie ;
J'ai plié sous ton sort, j'ai pleuré de tes pleurs ;
Où ton âme a monté mon âme l'a suivie ;
Pour aider tes chagrins, j'en ai fait mes douleurs.
Mais, que peut l'amitié ? l'amour prend toute une âme !
Je n'ai rien obtenu ; rien changé ; rien guéri :
L'onde ne verdit plus ce qu'a séché la flamme,
Et le cœur poignardé reste froid et meurtri.
Moi, je ne suis pas morte : allons ! moi, j'aime encore ;
J'écarte devant toi les ombres du chemin :
Comme un pâle reflet descendu de l'aurore,
Moi, j'éclaire tes yeux ; moi, j'échauffe ta main.
Le malade assoupi ne sent pas de la brise
L'haleine ravivante étancher ses sueurs ;
Mais un songe a fléchi la fièvre qui le brise ;
Dors ! ma vie est le songe où Dieu met ses lueurs.
Comme un ange accablé qui n'étend plus ses ailes,
Enferme ses rayons dans sa blanche beauté,
Cache ton auréole aux vives étincelles :
Moi je suis l'humble lampe émue à ton côté.
Marceline Desbordes-Valmore
"S'il avait su" Marceline DESBORDES-VALMORE
S'il l'avait su
S'il avait su quelle âme il a blessée,
Larmes du coeur, s'il avait pu vous voir,
Ah ! si ce coeur, trop plein de sa pensée,
De l'exprimer eût gardé le pouvoir,
Changer ainsi n'eût pas été possible ;
Fier de nourrir l'espoir qu'il a déçu :
A tant d'amour il eût été sensible,
S'il avait su.
S'il avait su tout ce qu'on peut attendre
D'une âme simple, ardente et sans détour,
Il eût voulu la mienne pour l'entendre,
Comme il l'inspire, il eût connu l'amour.
Mes yeux baissés recelaient cette flamme ;
Dans leur pudeur n'a-t-il rien aperçu ?
Un tel secret valait toute son âme,
S'il l'avait su.
Si j'avais su, moi-même, à quel empire
On s'abandonne en regardant ses yeux,
Sans le chercher comme l'air qu'on respire,
J'aurais porté mes jours sous d'autres cieux.
Il est trop tard pour renouer ma vie,
Ma vie était un doux espoir déçu.
Diras-tu pas, toi qui me l'as ravie,
Si j'avais su !
Marceline Desbordes-Valmore
Souvent au cours d'une vie d'adulte, on se dit : "Si j'avais su" et il arrive que l'on dise "S'il avait su..."
Et alors, si le chemin suivi avait été différent, c'est toute une vie, peut-être deux qui auraient été différentes...
Et de ce fait, des destins différents...
On peut le penser mais pas le ressasser car les regrets n'apportent qu'amertume et tristesse.
Brigitisis