Paris (VIIIe), lundi. Condamné en 1994 pour le meurtre de sa patronne, puis gracié partiellement en 1998, Omar Raddad (à gauche) fait l’objet d’un film réalisé par Roschdy Zem.
L’un est un acteur à qui tout réussit. L’autre, un ex-jardinier condamné en 1994 pour le meurtre de sa patronne, Ghislaine Marchal. Avec « Omar m’a tuer », son deuxième long-métrage en tant que réalisateur attendu aujourd’hui sur 250 écrans, Roschdy Zem revient sur l’un des faits divers les plus célèbres de ces vingt dernières années et pointe, avec une minutie passionnée, les lacunes d’une instruction « à charge ». SUR LE MÊME SUJET
Gracié mais pas blanchi«La seule victime, c'est ma tante»Notre critiqueGracié mais pas blanchiA son côté, Omar Raddad, 49 ans (joué par Sami Bouajila), égrène inlassablement les preuves de son innocence, comme la fameuse phrase « impossible à écrire dans le noir »…
Comment est né ce film sur l’affaire Omar Raddad?
ROSCHDY ZEM. A l’origine, Rachid Bouchared, le réalisateur d’« Indigènes », avait acheté les droits de l’autobiographie de M. Raddad dans l’idée d’en faire un film avec moi pour interprète. J’ai fini par me passionner non pas pour l’affaire mais pour l’homme. Je vais vous faire une confidence : à l’époque, quand il a été jugé et condamné, j’ai pensé qu’il devait être coupable, tout simplement. Mon propre avocat, qui est un ami, m’a dit la même chose. C’est en étudiant l’aspect judiciaire, les zones d’ombre, tous les détails qu’on dévoile dans le film, que j’ai découvert qu’on pouvait condamner quelqu’un à dix-huit ans de prison sur un dossier aussi fragile, pour ne pas dire incohérent.
Et vous, Omar, que pensiez-vous de ce projet?
OMAR RADDAD. Quand on a commencé à en parler, en 2002-2003, j’ai d’abord demandé à mes enfants s’ils étaient d’accord. Après, j’ai surtout prié Roschdy de ne rien rajouter, parce que l’histoire n’est pas finie. C’est exactement ce qu’il a fait : tout est vrai. Par exemple, le tournage a eu lieu dans l’appartement où j’ai été arrêté. Ça, c’était un choc. Roschdy m’avait prévenu, il m’avait dit : « Méfie-toi parce que Sami te ressemble. » Mais, je ne le cache pas, j’ai mis quinze jours à m’en remettre. Pour vous, c’est un film. Moi, c’est ma vie.
M. Raddad, avez-vous participé au scénario? Demandé des corrections?
O.R. Non, non, je n’ai rien corrigé.
R.Z. Si, tu m’as dit une chose : « Les gendarmes ne m’ont pas menotté devant ma famille quand ils m’ont arrêté. » J’ai trouvé ça bienveillant.
Votre première réaction à la découverte du film?
O.R. Pour moi, ce n’est pas Sami Bouajila que j’ai vu, c’est exactement Omar Raddad entre 1991 et 1998. Tout, le regard, les mots, surtout les mots, quand j’étais en garde à vue, aux assises… C’est moi à 1000%.
R.Z. Après la projection, Omar m’a dit : « J’ai l’impression qu’il y a une caméra qui m’a filmé il y a vingt ans ! »
Quel souvenir gardez-vous de l’extraordinaire battage médiatique sur votre affaire?
O.R. De 1991 à 1994, j’ai été sali pour des choses que je n’ai pas faites. Dans le film, on voit ma femme pleurer au verdict, mais toute la salle a crié, tout le monde attendait un acquittement. Il y a deux victimes : Mme Marchal, car personne ne mérite de mourir ainsi; et moi, car personne ne mérite de payer pour un autre. Ce qui me donne la force de continuer, c’est ma foi. J’ai confiance en la justice, en la loi, même si certains magistrats ne la respectent pas.
R.Z. Il faut rappeler que le juge Renard, qui a instruit l’affaire, a été révoqué par le Conseil supérieur de la magistrature pour faux, usage de faux et violation du secret de l’instruction.
Comment vivez-vous aujourd’hui?
O.R. Malheureusement, je ne vis pas. Dans ma tête, je suis toujours derrière les barreaux. J’habite à Toulon. Je vois mes deux enfants, qui ont 24 et 20 ans. Depuis 2001, j’ai une carte d’invalidité, je ne peux plus travailler.
Deux livres défendent la thèse de la culpabilité d’Omar Raddad…
R.Z. Il n’y a aucun élément nouveau et les éléments qui auraient pu l’innocenter ont été soit écartés, soit détruits, comme les dernières photos prises par Mme Marchal avant sa mort et brûlées par le chef de la gendarmerie. On est dans l’absurde. Quand même, en 2000, quand on demande à Omar s’il est d’accord pour une analyse ADN, alors qu’il est libre, non seulement il accepte mais il paye lui-même son billet de train pour y aller!
O.R. La justice n’a rien cherché au départ…
Qu’espérez-vous aujourd’hui?
O.R. La vérité et un deuxième procès
Le Parisien
J'ai bien envie d'aller le voir ce film en effet !! Ah la Justice !!!!